Contribution de
N°49 - Jean-Louis LAVOISARDTexte et illustrations rassemblés à l'occasion de l'écriture de l'ouvrage :
"Un siècle d'aventure humaine et industrielle par CANTAGREL"
La SAT arrière petite-fille des Etablissements Grammont
Les établissements Grammont sont créés en 1849 à Pont-de-Chéruy par Etienne-Claude Grammont. Salarié d’une entreprise qui fabriquait notamment des cages de crinolines et des baleines de parapluies, il décide de s’installer à son compte et se lance dans des activités rapidement profitables. Il installe en effet successivement des ateliers de tréfilage, fonderie, laminage à froid et à chaud sur les bords de la Bourde.
En 1890, son fils Alexandre, de retour des Etats-Unis est associé. Ayant hérité de l'esprit d'initiative de son père, il possède par ailleurs de grandes qualités d'homme d'affaires ; il pressent tout l'avenir réservée à l'entreprise et après avoir acheté les brevets de la firme anglo-américaine Mordey-Victoria commence à se diversifier vers les applications industrielles de l'électricité en développant la production de matériels électriques.
Il s’agit d’abord de la fabrication des conducteurs électriques : fils et câbles nus, pour transport de force ; fils trolley, câbles sous gaine étanche en plomb. Cela entraîne le développement des ateliers de fonderie, de laminage existants et la création d’une câblerie. Pour répondre la production des premiers câbles télégraphiques sous-marins, une usine est construite à Saint-Tropez. Un premier câble français de 1200 km est posé entre Marseille et Tunis en 1893, d’autres suivent (Mozambique, Madagascar, La Réunion, L’île Maurice, Indochine, Chine, Indonésie) enfouis dans certains cas à plus de 5 500 m.
Dés 1890, lors de l'exposition à Paris, c’est un groupe électrogène avec altérateur triphasé des Etablissements Grammont qui fournit, en partie, l'électricité dont l'exposition a besoin.
Cette deuxième phase de l'évolution industrielle est marquée par la construction de transformateurs, de dynamos, de moteurs, d’alternateurs, de moteurs asynchrones, dont certains fonctionneront longtemps dans les mûrs des entreprises qui s’y succéderont plus tard. C’est également la construction de moteurs électriques pour tramways, l'installation des lignes de Saint-Etienne, de Besançon et de Dijon. Cet effort est récompensé par un grand prix à l'exposition de Lyon en 1894.
L'utilisation du caoutchouc comme isolant de conducteurs électriques incite Alexandre Grammont à entreprendre, pressentant le développement de l'industrie automobile, la fabrication de bandages pleins puis après avoir acheté les brevets de John Boyd Dunlop de véritables pneumatiques pour poids lourds. D’autres applications voient également le jour ; tuyaux, courroies, clapets, joints pour pompes et chambres à air pour vélos et autos.
En 1905, la production des équipements électriques est installée dans la filiale « Ateliers de Constructions Electriques de Lyon et du Dauphiné » route d’Heyrieux à Lyon.
Il s’agit donc d’un essor prodigieux qui fait du groupe Grammont, l’une des premières industries d’Europe. Il employait 143 personnes en 1881, 500 en 1895 et 2 150 à la veille de la guerre de 1914. Il va fournir à l’armée des fils téléphoniques, des laitons pour les arsenaux, des douilles d'obus et des pneumatiques pour les véhicules militaires.
En octobre 1914, Gustave Ferrié installe l'émetteur militaire de Lyon La Doua. Se tournant vers Grammont qui, maîtrisant la capacité de tréfiler le tungstène en fils de moins de 0,1 mm de diamètre, a installé à Cuire et Caluire une usine de production de lampes d'éclairage, il lui confie la fabrication de la première triode amplificatrice. En février 1915, un premier modèle, encore fragile, sort de chez Grammont en petite série... La lampe TM est née, elle est produite à raison de 1 000 par jour en novembre 1918. La paix revenue, la production concerne des modèles civils de la marque FOTOS.
Durant la guerre, alors que les ouvriers sont envoyés au front, les usines Grammont fonctionnent à plein régime grâce à la main d’œuvre provenant principalement de Grèce, d’Italie et Arménie. Au-delà, le développement des activités continue à se poursuivre avec la création de la Société des Porcelaines et Appareillages Electriques Grammont, qui reprenant les activités de la Société EURIEULT (41, rue Cantagrel à Paris) et exploitant les brevets de General Electric et Western Electric, produit de nombreux terminaux téléphoniques et deviendra Société des Téléphones Grammont.
Dans les années 1920 apparaissent encore la Société d’études des Liaisons Télégraphiques et Téléphoniques, la Société « Le Téléphone Automatique », la Société d’Applications Téléphoniques (la première SAT !). Mais au-delà de 1929, les mauvaises affaires, puis la seconde guerre mondiale provoquent la disparition progressive de l’empire Grammont, non sans un dernier sursaut : la tentative de diversification dans la production de récepteurs de radiodiffusion puis de téléviseurs.
Les illustrations ci-dessous témoignent de la variété des produits proposés par le groupe Grammont dans les années 1920 à 1930.
La "fée électricité" dans tous ses états,
mais aussi les isolants et le caoutchouc !
Les appareils téléphoniques
De la première triode TM (Télégraphie Militaire) aux petites "bleues !
La traction électrique (trains et tramways)
et pour terminer récepteurs de radiodiffusion et de télévision !
Les activités furent reprises par différentes organisations successives :
- Tréfilerie et laminoirs du Havre, Tréfimétaux, Péchiney puis SMI/KME pour fonderie et laminoirs,
- Schneider-Westinghouse, puis Jeumont Schneider pour les gros équipements électriques,
- Pirelli, ICS puis Phoenix pour le caoutchouc,
- SAGEM/SAT pour les télécommunications,
- etc ..
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Les « relations » entre le groupe Grammont et la SAT s’articulent de la manière suivante :
- Léon Parcé dirige la câblerie de Pont de Chéruy lorsque celle-ci produit les premiers câbles téléphoniques français satisfaisant pleinement les exigences des PTT (1928).
- La Câblerie de Riom, produit les câbles suivants après un accord entre la CSEE et Grammont (1921).
- La Société des Téléphones Grammont reprend les activités d’EURIEULT, installé rue Cantagrel à Paris (1919 ?)
- Myron Lebedinsky rejoint la Société des Téléphones Grammont à Malakoff (1924)
- La production des téléphones est transférée de la rue Cantagrel à Malakoff, la production des lampes FOTOS s’installe rue Cantagrel.
- Grammont détient à 98 % le capital de la Société d’Applications Téléphoniques (SAT) créée en 1932.
- Cette première SAT, s’installe rue Cantagrel après un premier aménagement du bâtiment existant.
- SAGEM, crée la Société Anonyme de Télécommunications en reprenant les activités de la Société d’Applications Téléphoniques de laquelle Grammont souhaite se retirer devant de lourds problèmes financiers (1939).
- Des redevances pour les brevets antérieurs seront versés à Grammont par la nouvelle SAT jusqu’en 1947.
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