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Contribution de 12 - Jacques HOBER

 INTRODUCTION ET DEVELOPPEMENT DE L’INFORMATIQUE A LA SAT

Les débuts de l’informatique

 

Les débuts de l’informatique à la SAT remontent à la fin des années 60. Il s’agissait à l’époque de choisir une machine destinée à satisfaire les besoins du Service du Personnel, des services financiers, de la gestion de production de la Direction Industrielle et de calcul scientifique de la Direction Technique.
Le choix de la machine se fit à la DT sous l’égide de Roger RUMEAU. Ce choix fut confié à Anne-Marie GERVAISE qui avait exercé des responsabilités au CNET dans ce domaine. La machine, extrêmement modeste, retenue fut un IBM 1130 avec une mémoire centrale de 8 kilo-octets, alimenté par cartes perforées. Il fut mis en service par Eliane LAFERRIERE qui réalisa le premier programme de paye en Fortran en 1967 ou 1968. La mémoire fut portée rapidement à 16 Ko et au début des années 70 fut implanté un IBM 360.
La deuxième grande application fut la gestion des nomenclatures de fabrication que l’on appela la GSO (Gestion sur Ordinateur). La Direction Technique expérimenta, en 1969, un logiciel IBM : le BOMP ou « Bill Of Material Processing ». Il fut alors décidé d’augmenter les moyens de calcul par l’addition en 1970 d’un IBM 360 destiné à la gestion ; le 1130 fût alors réservé au calcul scientifique. C’est alors que fût créé le Service Informatique animé par François PERNÉE sous la direction de Jacques FAUTIER.
Jusqu’alors les nomenclatures figuraient sur les plans de fabrication établis dans les bureaux d’études, à partir des documents transmis par ingénieurs et techniciens des laboratoires de recherche. Les bureaux d’étude étaient regroupés dans un service central : Le Service Technique qui comportait alors environ 200 personnes au sein de la Direction Technique. Gérard GRENECHE fut chargé de mettre en œuvre la GSO au Service Technique. Ceci entraîna un premier bouleversement dans le travail des dessinateurs en dissociant la phase de dessin et d’édition des nomenclatures. La GSO renforça la standardisation des composants par la création de composants « multiples » et « polyvalents » pour les variantes d’approvisionnement en liaison avec le Service Achats. André BOILLET et Casimir WEISS en furent les artisans à la Direction Technique puis vers le milieu des années 80 à la Direction Qualité.
Du côté des laboratoires, le calcul scientifique prit son essor avec Philippe ALLEMANDOU pour le calcul des filtres en téléphonie et avec Joseph JOWZIACK pour le calcul des systèmes optiques pour l’infrarouge avec un produit du marché : le POSD.

La CAO centralisée

 

A la même époque sont apparus sur le marché les photo-traceurs destinés à la réalisation des masques de circuits imprimés ainsi que les premiers programmes de Conception Assistée par Ordinateur.
Le choix d’un premier photo-traceur fut effectué aux Etudes Générales par Daniel LAMIRAULT et Catherine MOREAU. Après de nombreux essais, dont une partie en sous-traitance, le système anglais QUEST fut retenu. Philippe MONTHÉAN et Daniel POULET furent chargés de son exploitation aux Méthodes Centrales. L’étude du câblage imprimé était réalisée manuellement au Bureau d’Etude et était suivie d’une opération de digitalisation sur une tablette munie d’une grille électrique permettant d’enregistrer le dessin du câblage sur un miniordinateur destiné à produire le ruban perforé de commande du photo-traceur. L’étude manuelle devait être retranscrite sur un support stable dit document de digitalisation. C’est dire que l’établissement du dossier de fabrication restait manuel.
Le système QUEST ne pouvait pas absorber la totalité des études ; les Bureaux d’Etudes firent largement appel à la sous-traitance. Il existait à l’époque des sociétés de services exerçant une activité de bureau d’études qui s’équipèrent de systèmes de digitalisation et de photo-traçage. Elles permirent à la SAT d’effectuer de nombreux essais sur différents matériels qui se révélèrent très utiles par la suite pour la décentralisation.
A la fin des années 60 et jusqu’au milieu des années 70, les programmes de CAO tant dans le domaine mécanique qu’électronique étaient développés et exploités sur des ordinateurs de moyenne puissance (IBM 360, CONTROL DATA, UNIVAC…). Pour ce qui concerne plus particulièrement les circuits imprimés, des algorithmes de routage existaient depuis le début des années 60, notamment l’algorithme de Lee (1961). Cependant, l’offre du marché était quasiment inexistante. En 1969, sous l’égide de Roger RUMEAU, Anne-Marie GERVAISE et Eliane LAFERRIERE, des essais de routage basé sur l’algorithme de Lee furent entrepris sur l’IBM 1130. Le projet fut ensuite confié en 1970 à Jacques HOBER, physicien venant du Laboratoire Infrarouge et reconverti à l’informatique pour la circonstance.
Les premiers essais portèrent d’abord sur les circuits « simple face » puis sur les « double faces » ce qui entraîna le portage sur l’IBM 360 afin de bénéficie des possibilités de la mémoire virtuelle car les programmes étaient très gourmands en mémoire. Le programme fut baptisé « CACIO » (Conception Assistée des Circuits Imprimés par Ordinateur). Les résultats étant encourageants, son expérimentation fut entreprise au Service Technique dès 1970. Les dessinateurs devaient remplir des bordereaux de saisie pour l’atelier perforation de cartes. Les temps d’exécution des programmes étaient très longs et nécessitaient des passages en machine pendant la nuit, si bien que les dessinateurs avaient le temps de réaliser l’étude manuelle entre les passages en machine. Un programme d’interface avec le photo-traceur fut développé. Les premiers Bureaux d’Etudes qui se lancèrent dans l’utilisation de CACIO furent les Groupes E, F et J dirigés par Robert SAINTAIGNAN assisté de Louis JAN, Claude DURET et Michel Louis MARTIN. Il était bien adapté aux équipements de Commutation Electronique. Le départ de cette branche à Dourdan pénalisa fortement l’exploitation par l’absence de liaison directe à l’ordinateur central, malgré la forte implication de MM. DURET et MARTIN.
Les développements de CACIO étaient basés sur l’observation de la démarche plus ou moins intuitive des dessinateurs-implanteurs à la planche à dessin dans les études de cartes équipées pour aboutir à une modélisation de leur comportement. L’utilisation d’un tel programme bouleversait radicalement leur méthode de travail en supprimant la progressivité dans l’élaboration de leur étude. L’introduction des systèmes interactifs allait redonner la maîtrise de leur travail aux dessinateurs.
 
La CAO décentralisée

 

Vers le milieu des années 70 les systèmes de digitalisation du marché comportèrent des écrans de visualisation qui permirent de les rendre interactifs pour devenir des systèmes de Dessin Assisté par Ordinateur (DAO). Il fut alors possible de les installer dans les Bureaux d’Etudes. Le choix s’est porté sur le leader de l’époque COMPUTERVISION et tous les bureaux d’études furent équipés. Comme pour CACIO, ce furent encore les Groupes E, F et J qui jouèrent un rôle moteur. CACIO fut interfacé à COMPUTERVISION pour le traitement des refus de routage. Aux Méthodes Centrales le système QUEST fut également remplacé par un COMPUTERVISION.
En 1977, la GSO devint interactive par la mise en service d’écrans alphanumériques. Jacques HOBER fut alors intégré au Service Technique pour prendre en charge l’ensemble des problèmes informatiques. Les écrans alphanumériques furent alors utilisés pour CACIO tandis que des écrans graphiques étaient également reliés à l’IBM central : CACIO devint complètement interactif à la satisfaction de tous et plus particulièrement de la Division Commutation Electronique.
Tout à la fin des années 70, l’apparition des « mégaminis » ordinateurs (machines à mots de 32 bits comme les ordinateurs centraux) donna une impulsion nouvelle à la CAO. Il était maintenant possible de disposer d’ordinateurs départementaux de puissance comparable voire supérieure à celle des ordinateurs centraux de gestion, mieux adaptés au calcul scientifique et disponibles à des coûts bien plus faibles. Ainsi fin 1980 fut mis en service aux Groupes E et F un VAX 780 de DEC. Le programme de routage y fut transféré, un programme de placement des composants fut développé et la production du dossier complet de fabrication fut mise en service peu après.
Le programme « maison » de placement-routage, développé et mis en œuvre par une équipe des plus réduites était bien adapté aux circuits de classe 4 et d’une utilisation simple par les dessinateurs. Il a permis une transition douce vers les systèmes du marché qui devinrent encore plus performants à partir de 85-86 avec l’apparition des stations de travail individuelles.
En 1981-82, fut créée, sous l’égide de Jacques DOCKÈS, une cellule de conception de circuits intégrés animée par Jean-Marie LAGORSSE assisté de François LAMY. Cette cellule fut équipée d’un système MENTOR GRAPHICS pour la saisie de schémas électroniques, la simulation logique et le placement-routage des masques pour les fondeurs de silicium.
La Fabrication et la FAO

 

La Direction Industrielle avait en charge le tracé optique des films unitaires des câblages imprimés, tant pour les prototypes que pour la fabrication en série. Elle décida d’équiper l’usine de Lannion de systèmes de FAO (Fabrication Assistée par Ordinateur) pour réaliser et contrôler les panneaux de fabrication, face à la nécessité d’une plus grande précision pour les circuits multicouches de haute densité. En 1985, Alain JAFFREZIC et ses collègues entreprirent avec Jacques HOBER des essais de photo-traceurs laser à balayage de grande dimension dont la vitesse de tracé ne dépendait plus que de la vitesse de défilement du film et non plus de la densité du circuit. A cette époque, l’idée se répandit qu’il est indispensable de combler le fossé existant entre les concepteurs et les fabricants : c’était le début de la CFAO (Conception et Fabrication Assistées par Ordinateur). Le système retenu en 1986 fut SCITEX.

Cette même année, à l’occasion d’un regroupement de certains services centraux à la Direction Technique, fut créé le service TGAO (Techniques Générales Assistées par Ordinateur). Rattaché au Directeur Technique Roger RUMEAU, et dirigé par Philippe DANAN, il comportait un groupe support informatique animé par Jacques HOBER. Sa mission était de standardiser les équipements de CFAO et les interfaces entre les différents services utilisateurs.
En matière de CAO, l’offre du marché s’était considérablement renforcée surtout dans le domaine de l’interactivité plus que dans l’efficacité du placement-routage automatique. Les dessinateurs retrouvaient leur autonomie, ce qui compensait la faiblesse des algorithmes. Après environ un an d’essais, SCI-CARDS fut mis en œuvre en 1987 par Christian PENY au groupe E. Il nécessita un effort de formation très important car son utilisation se  révéla moins aisée que prévu et le support du fournisseur largement insuffisant. CACIO fut encore utilisé pendant cinq ans grâce à sa simplicité d’utilisation et à sa bonne adaptation à une grande partie des cartes étudiées.
Même avec des écrans reliés à l’IBM central, l’établissement des nomenclatures manquait de souplesse. Le TGAO avec Claude MORTAL et Rémy FRAPPESAUCE mit au point un système de préparation locale des nomenclatures sur PC en utilisant un SGBD (Système de Gestion de Bases de Données) en Dbase3.
Face à la diversité des besoins évolutifs des divisions et des usines et aussi de leur désir d’autonomie, il était difficile de standardiser complètement les équipements informatiques. Il devint alors essentiel de maintenir des possibilités de communication entre les différents systèmes. C’est ainsi que se fit jour l’idée des « fichiers neutres » indépendant à la fois des équipements de conception et des outils de production (préoccupation déjà présente dans les années 70 où Administration et CNET animaient des groupes de travail en ce sens).
C’est TGAO qui prit en charge cet important travail de définition, pour lequel il était impérieux d’imaginer les besoins futurs en matière de description des produits et des outils de production. On assura ainsi un maximum de flexibilité pour l’évolution des modes de conception et de production.
En route pour l’ingénierie concourante

 

La CAO mécanique fit ses débuts dans le domaine des études relatives à l’infrarouge avec Guy WILHELM en utilisant le programme MEDUSA sur un écran graphique connecté au VAX. Elle devait par la suite, comme toute la CAO, faire appel aux PC.

L’offre des fournisseurs devint alors performante en matière de saisie de schéma et de simulation. L’IAO (Ingénierie Assistée par Ordinateur) permit ainsi d’étendre la CAO vers les laboratoires. L’étude électrique, la simulation, les tests, l’implantation et la conception mécanique, l’établissement du dossier de fabrication, le calcul du coût, s’intégrèrent, petit à petit, comme une tâche globale le « Concurrent Engineering » pour lequel de nouveaux outils (IAO) furent développés par les constructeurs spécialisés.
En 1990, après une très forte décentralisation qui créa des Divisions opérationnelles furent mis en place des Schémas Directeurs Informatiques s’appuyant sur les réseaux et les micro-ordinateurs. A la DTEL, le Directeur Technique Bernard MARC, avec l’aide de Jean-Louis LAVOISARD et Jacques HOBER de la DIST établit un schéma directeur informatique, s’appuyant sur les réseaux et intégrant les microordinateurs. Le GSI fut rattaché à la DTEL et le TGAO à la Direction Industrielle. Le GSI animé par Simone GREGOIRE, eut pour mission de gérer le réseau DTEL et de fournir une assistance technique aux utilisateurs des différents systèmes informatiques des laboratoires et bureaux d’études. SCI-CARDS, toujours limité sous l’aspect algorithmique et n’offrant pas de possibilité d’IAO fut abandonné dans le schéma directeur au profit de MENTORGRAPHICS qui avait beaucoup progressé dans le domaine des cartes équipées.

Conclusion

A la différence de la grande majorité de concurrents et partenaires, nous avons pendant plus de quinze ans, de 1969 à 1986, privilégié le développement interne par rapport à l’acquisition de systèmes du marché. Certes, la Thomson, la CIT et le CNET avaient également entrepris des développements, mais seule la CIT a persévéré avec une équipe importante non seulement pour ses besoins internes mais également avec un objectif de commercialisation.

A la SAT l’objectif était double :
1 - créer un pôle de compétence pour effectuer les choix parmi les systèmes du marché le moment venu et effectuer les développements nécessaires à leur adaptation aux besoins spécifiques de la société,
2 - former le personnel des Bureaux d’Etudes avec des programmes simples d’utilisation où les étapes successives étaient bien décomposées qui leur permirent par la suite de s’adapter aux programmes du marché qui fonctionnaient plutôt comme des boites noires.
 
L’intégration des systèmes XAO a fortement contribué à éliminer les saisies redondantes, d’informations. Au milieu des années 90 devait être entreprise l’informatisation des Archives dans le but d’aboutir à l’usine sans papier.

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